jeudi 24 septembre 2009

Retour sur le salon odébit 09

Par notre ami Pierre Ygrie, du Web du Gévaudan, que j'ai recroisé sur le salon.

Du salon Odébit auquel je viens d’assister je ne retiendrai que deux choses :

-l’infrastructure crée de la valeur. Cette « évidence » a été martelée par tous les intervenants et démontrée par des gens qui ont fait des actions concrètes comme dans la Manche où il ne reste plus que 170 foyers sur 270000 à moins de 2 mégas !

-cette infrastructure doit être en fibre optique tant pour le très haut débit fixe (FTTH) que pour le très haut débit mobile (LTE). Un « bémol » a été apporté sur ce point, et c’est bien compréhensible, par les vendeurs de solutions alternatives très présents au salon !

Je me conterai donc de vous (re)dire ce que nous avons écrit maintes fois : la nécessité pour la France de disposer d’une infrastructure en fibre optique publique, neutre et ouverte à la concurrence.

La nécessité de structuration du territoire en fibre optique est « affirmée » aujourd’hui, et nous nous en réjouissons, par les plus hautes instances de la nation ! Il reste maintenant à la faire et c’est ici que le rôle des opérateurs et surtout de la puissance publique est essentiel !

1-Quelle infrastructure ?

Le réseau de fibre optique public et ouvert à la concurrence sera fait de :

-la mutualisation des réseaux existants, essentiellement celui de l’opérateur historique, souvent le seul ou presque dans les territoires ruraux. Encore faut-il que la cartographie des réseaux existants soit précise et transparente, ce qui ne parait pas être tout à fait le cas en dépit de l’obligation légale récente.

-la création de nouveaux réseaux par les collectivités territoriales plus ou moins aidées par un « cocktail » de mesures ( emprunt, taxe sur les abonnements, fonds européens et nationaux comme le FNADT, taxe sur les opérateurs...) selon les possibilités financières de chacun : peu ou pas d’aide pour les zones denses, aide maximale pour les territoires ruraux).

2-Pourqoui un tel réseau ?

-fortement créateur d’emplois. J'ai retenu un chiffre qui, même s'il est à prendre avec des pincettes comme tous les chiffres, est intéressant à "méditer": un milliard d'euros investis ur la construction d'un réseau autoroutier génère 80% d'emplois directs et 20% d'emplois indirects, pour la construction d'un réseau numérique c'est l'inverse : 20% d'emplois directs, 80% d'emplois indirects. A l’ évidence le numérique crée des emplois pérennes

-solidarité territoriale . Je ne reviendrai pas sur notre demande permanente d’offrir à chaque citoyen une « place numérique » indépendante de sa « place physique » et égale pour tous

-opportunité territoriale. Là encore nous avons insisté maintes fois sur l’ « atout Espace » de la France et sur le lien étroit entre Très Haut Débit et développement durable. L’accès distant à des ressources de plus en plus « lourdes » encouragé avec raison par le gouvernement et que seul autorise le très haut débit (5 fois plus d’informations dans les réseaux en 2012 qu’en 2015 !) réduira les transports et,partant,les nuisances de tous ordres ( économies d’énergie, pertes de temps,pollutions,stress…) dans tous les domaines . En matière de santé par exemple où « il vaut mieux faire voyager les informations que les malades »les applications sont multiples : télésurveillance médicale,téléconsultation ,télé expertise,téléassistance à domicile, télé médico-social .En matière d’éducation la liste est également longue :classes virtuelles, espaces numériques de travail (ENT),suivi de cours individuels à distance. Avec du très haut débit les transports deviennent « intelligents » grâce à une « circulation d’informations » rapide,fluide et organisée. Quant aux perspectives qu’autoriserait la télé présence dans le monde de l’économie (réunions à distance,voyages d’affaires virtuels,travail collaboratif à distance,télétravail à la campagne …) elles sont innombrables. Plusieurs entreprises, dont Covage, présente au salon, ont d’ores et déjà obtenu des résultats probants dans ce domaine. Mais la plupart de ces applications impliquent des circulations d’informations lourdes (images,son),rapides,fluides et symétriques ,ce que ne permet pas l’Adsl. Pour que ces applications se généralisent sur l’ensemble du territoire le Très Haut Débit par fibre optique dont bénéficieront en 2012 des millions de foyers des zones denses (cf mesures Arcep du 22 juin) sera indispensable. L’apport d’une ruralité « numérique »dans la démarche de développement durable est pour nous évident. La généralisation du très haut débit non seulement favoriserait un aménagement plus équilibré du territoire mais constituerait aussi un support précieux pour nous procurer de la “matière à réfléchir” et développer l’”intelligence collective” nécessaire pour “inventer ” l’avenir ! Nous avons à « inventer » le changement dans tous les domaines ; ce ne sera possible que par la multiplication des échanges et une mise en commun des réflexions . Même si certains pourraient sourire de cette « platitude »on réfléchit mieux à la campagne . Or le travail collaboratif à distance est aujourd’hui possible avec Internet à condition de disposer à la campagne des mêmes outils qu’en ville.

3-Le rôle des opérateurs ?

Les opérateurs, et singulièrement l’opérateur historique, font actuellement leur « business » sur le réseau cuivre, amorti depuis longtemps. On peut donc comprendre leur réticence à abandonner la « poule aux œufs d’or » pour construire un réseau estimé à 40 milliards d’euros, d’autant que, si j’ai bien tout compris, pour « faire court », 60% des abonnés seulement seraient apparemment potentiellement concernés par du FTTH (20% des foyers n’ont plus de téléphone fixe et 20% se contenteraient de l’Adsl). En l’état actuel de la réglementation chacun des trois grands ne pourrait donc espérer que 20% de cette cible potentielle. En calcul rapide le retour sur investissement ne serait possible que dans 8 ans ! Ce petit exercice (à vérifier) permet de mieux comprendre les réticences des opérateurs à investir massivement sur la fibre, pourtant unanimement plébiscitée pour permettre à la France, au demeurant très bien placée sur le haut débit de rattraper son retard, tout aussi patent, sur le très haut débit. En posant la question « la concurrence par les infrastructures a-t-elle un sens ? » Stéphane Lelux, président de Tactis, s’interroge sur l’opportunité de laisser construire, y compris dans les zones denses, plusieurs réseaux, au risque d’obérer les marges des opérateurs et de freiner leurs investissements beaucoup plus, selon moi, qu’une taxe pour alimenter un fonds de péréquation !

Le rôle des opérateurs dépend donc directement de la stratégie que devra définir le gouvernement s’il veut aller au bout de sa logique : structurer l’ensemble du territoire en un réseau porteur d’emplois,de croissance et de développement durable pour des décennies. La France, championne du haut débit, est en retard sur le très haut débit. Seules des mesures radicales lui permettront non seulement de rattraper ce retard mais, pourquoi pas ( ?), de prendre de l’avance .

Voilà l’essentiel de ce que j’ai retenu du salon Odébit ...mais j’ai aussi retenu que rares étaient les intervenants qui osaient poser la question qui fâche, la« nationalisation », ( serait-ce encore un « gros mot » ? ), quelle qu'en soit la forme, des infrastructures de l’opérateur historique ?

Qu’ai-je retenu encore ? Ah oui ! la fameuse question du choix « par où commencer ? les infrastructures ou les usages ? » Le directeur de Manche numérique, qui sait de quoi il parle, a mis tout le monde d’accord en insistant sur la spirale vertueuse entre infrastructures et usages. Ne disons nous pas depuis toujours aux Webs du Gévaudan, que le premier des services , c’est l’accès aux services ?

Après ce salon Odébit 2009 et avant les assises numériques du 1er octobre nous persistons et nous signons « au commencement étaient les infrastructures » !

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